Une longue marche vers les étoiles
Les feux d’artifice ouvrent le bal
« Fils du ciel » : c’est ainsi qu’on surnomme le premier empereur de Chine au 2e siècle avant JC, puis tous ceux qui vont lui succéder. Ce titre révèle la place essentielle que l’espace occupait déjà dans la Chine impériale. Les astronomes de l’époque observaient méticuleusement les étoiles. Ils ont été les premiers à signaler la présence de comètes ou de phénomènes rares comme les éclipses. Le premier observatoire « royal » a même vu le jour 2 000 ans avant avant JC… alors qu’en Europe, les observatoires nationaux n’ont été créés qu’au 17e siècle !
Pendant la période antique, c’est la technologie qui s’impose avec l’invention de la poudre et de ses prolongements aériens : les feux d’artifice d’abord, puis les flèches-fusées tirées toujours plus loin sur les champs de bataille. Les calculs des poussées nécessaires pour échapper à la gravité ne font alors que commencer…

De la patate à la fusée
« Et nous ne sommes même pas capables d’envoyer une patate dans le ciel ! » La légende veut que cette phrase ait été prononcée par Mao Zedong, fondateur de la République populaire de Chine en 1957. Il l’aurait prononcée juste après le lancement par l’URSS du tout premier satellite de l’histoire, Spoutnik. Petit rappel : au lendemain du conflit mondial de 1939-1945, le monde s’enfonce dans une guerre froide, opposant deux blocs : l’Occident et le monde communiste. La course à l’espace est un ressort puissant de cette rivalité entre les Etats-Unis et l’URSS. Mais la Chine s’y invite d’une manière inattendue : chassé d’Amérique, comme tous les communistes, l’honorable Qian Xuesen, revient en Chine en 1955. Ce scientifique de haut niveau va faire profiter son pays du savoir acquis de l’autre côté de l’Atlantique. Il deviendra même « le père » du programme spatial chinois naissant. Dont la première réussite est le lancement de la fusée Longue Marche 1, le 24 avril 1970. Ce jour-là, c’est une nouvelle puissance spatiale qui décolle !

Des palais célestes et des lapins de Jade
Un an avant Longue Marche 1, les Américains étaient déjà loin. Et pour cause ! Ils marchaient sur la Lune ! Le retard qu’accuse la Chine est donc certain, mais il se comble progressivement. La preuve : en 2003, Yang Liwei accomplit 14 révolutions autour de la Terre et cinq ans plus tard, son compatriote Zhai Zhigang effectue la première sortie extra-véhiculaire chinoise. L’exploit suivant est la mise en service, en 2011, de Tiangong 1, traduisez « le palais céleste ». En réalité, une sorte de gros bidon de la taille d’un autobus, le premier laboratoire scientifique chinois placé en orbite. En 2013, Yutu, le « lapin de Jade » se hisse au rang de star nationale. Le petit robot embarqué dans la sonde Chang’3 se pose sur la Lune sans encombre, et il y restera 31 mois. Une nouvelle consécration pour la Chine qui prouve, cette fois encore, qu’elle est capable d’égaler les performances des autres grands du secteur.

Un œil géant pour sonder les mystères de l’espace
FAST est le plus grand radiotélescope du monde, un télescope qui capte les ondes radioélectriques. Et il est chinois. Il a été inauguré dans la province de Guizhou, à l’ouest de la Chine fin 2017.
FAST est surnommé Tianyan, « l’œil du ciel ». Les 4 450 panneaux qui forment sa coupole lui permettent en effet d’ « écouter » toutes sortes d’objets célestes très très lointains, comme les supernovas (des explosions qui marquent la fin de vie d’une étoile). FAST peut aussi surveiller des signaux de communication interstellaire. Autrement dit, des formes de vie intelligente au-delà de notre galaxie… https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/en-images-la-chine-publie-de-nouvelles-photos-de-son-plus-grand-telescope-du-monde_1724932.html
Des ambitions mûrement calculées
Un planning hyper chargé…
L’agence spatiale chinoise ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Son cap est clair : direction la Lune puis Mars. Le programme Chang’e (*) d’exploration lunaire est édifiant : à très court terme, atteindre la face cachée de notre satellite naturel (voir encadré), et ramener sur Terre des échantillons de roches. Puis, d’ici 10 ans, faire alunir des taïkonautes (astronautes chinois) avec l’espoir, à terme, d’implanter une base humaine. Pour coloniser la Lune, la Chine va se doter d’une très grosse fusée : Long Marche 9. Grâce à ce puissant lanceur, le pays entamera la construction de Tiangong 3, sa nouvelle station spatiale qui préparera les équipages aux vols de longue durée. La station sera ouverte à la collaboration internationale. Ce qui tombe bien : sa mise en service (2022) viendra combler le vide laissé par la mise à la retraite de la Station Spatiale Internationale (2024).
(*) Du nom de la déesse de la Lune dans la mythologie chinoise.