16 Octobre 2018

Le voyage extraordinaire de BepiColombo

BepiColombo, mission d’exploration de Mercure, est l’une des missions les plus complexes jamais entreprises par l’agence spatiale européenne. Car la petite planète, qui gravite dans le voisinage infernal du Soleil, est difficile d’accès.

C’est un long voyage qui attend BepiColombo. Lancé en octobre 2018, l'engin spatial européano-japonais ne va commencer ses expériences scientifiques autour de Mercure qu’en 2025. Après un périple de 7 années, et 18 fois le tour du Soleil !
Mercure n’est pas loin de la Terre (à l’échelle du Système solaire). Mais atteindre cette petite planète, puis se faire capturer par sa gravité, minuscule en comparaison avec celle du Soleil toute proche, demande une énergie considérable. Imaginez : une fois libérée par la fusée, BepiColombo devra « perdre » autant de vitesse qu’une fusée Ariane 5 doit en gagner pour envoyer un satellite dans l’espace. 8 km/s, c’est considérable. Pour cela, les ingénieurs utilisent l’assistance gravitationnelle, c’est-à-dire la gravité d’autres planètes pour freiner la sonde. « Bepi », pour les intimes, va ainsi « rebondir » 9 fois, 1 fois sur la Terre, 2 fois sur Venus et 6 fois sur Mercure, avant de pouvoir s’y mettre en orbite. Cette stratégie, qui permet d’économiser du carburant, va freiner le vaisseau de 3 km/s. Les moteurs électriques du module de croisière assureront aussi un freinage complémentaire, de 4 km/s. Et c’est enfin la sonde européenne MPO qui assurera la manœuvre finale d’insertion autour de la planète.

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BepiColombo utilisera 9 fois l'assistance gravitationnelle. Crédits : SapienSapienS

Pour comprendre, en images, le principe de l'assistance gravitationnelle :

https://jeunes.cnes.fr/fr/assistance-gravitationnelle-les-voyages-interplanetaires-optimises

3 satellites en un

Car BepiColombo, c’est 3 satellites en un. 2 sondes scientifiques MIO et MPO - ce sont elles qui se satelliseront autour de la planète, et un module de croisière chargé de conduire ces 2 sondes jusqu’à l’orbite de Mercure. Cette configuration a d’ailleurs complexifié le travail des ingénieurs. Rien que leur intégration, leur installation dans la fusée, a demandé 5 mois de travail. Alors qu’il faut un mois à peine pour un satellite classique.

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BepiColombo se compose de 3 éléments principaux : le module de transfert (en bas), la sonde MPO (au-dessus), la sonde Mio (tout en haut). Le dernier élément est le bouclier thermique qui protégera notamment les instruments. Crédits :  ESA/ATG medialab

Dans le barbecue solaire

Mercure se trouve à 58 millions de kilomètres du Soleil, une zone qui pourrait ressembler à l’enfer : la quantité de radiations est 10 fois plus importante que sur Terre. Et les températures sont extrêmes, jusqu’à 430 °C. Les constructeurs ont donc imaginé des technologies pour résister à ces conditions. Le vaisseau a été recouvert d’une pellicule composée d’une cinquantaine de couches de céramique et de titane. Cette isolation protégera les éléments vitaux des sondes, comme les instruments scientifiques ou les antennes, qui auraient pu fondre. Les panneaux solaires, eux, ont été en partie recouverts de cellules réfléchissantes pour renvoyer les rayons du Soleil et limiter leur température à 215 °C. Ils seront aussi orientés pour ne pas recevoir le Soleil de face aux saisons les plus chaudes.
« BepiColombo est certainement la mission la plus complexe jamais entreprise par l’agence spatiale européenne, conclut Pierre Bousquet, chef de projet BepiColombo au CNES, pour la partie française. La cible est difficile d’accès, dans un environnement très pénible, mais l’intérêt scientifique, fabuleux, justifie tout à fait le déplacement. »