18 Juin 2015

Crashs, balises et satellites

Le 8 mars 2014, un Boeing de la Malaysia Airlines disparaissait avec 239 personnes à son bord. L'événement a aussitôt mobilisé l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) qui présentait en février dernier un nouveau système pour suivre les avions en vol. Les satellites sont au cœur de ce nouveau dispositif. Eric Luvisutto, responsable du programme recherche et sauvetage au CNES, nous en dit plus à l'occasion du 51e Salon du Bourget, actuellement jusqu'au 21 juin 2015.

Image capturée en juin 2013 par les satellites Pléiades à l’occasion 50e Salon international de l’aéronautique et de l’espace de Paris-Le Bourget. Crédits : CNES 2013/Distribution Astrium Services/Spot image.

Localiser l'avion rapidement

Fin 2016, un nouveau système mondial de détresse et de sécurité aéronautique appelé GADSS devrait voir le jour. Quelles seront ses spécificités ?

Il sera basé sur l'obligation pour toutes les compagnies aériennes de suivre leurs avions en vol grâce à un signal émis automatiquement toutes les 15 minutes vers des satellites. En cas de situation anormale, ce signal devra être envoyé toutes les minutes. Cela permettra de localiser un avion dans un rayon d'environ 11 km et de pallier le problème des couvertures radars au-dessus des océans. L'enjeu actuel est de se mettre d'accord sur les paramètres anormaux de vols. Si certains paramètres sont évidents comme une brutale perte d'altitude, une chute de vitesse importante ou un brusque changement de cap, d'autres le sont moins car ils peuvent dépendre du type ou des performances de l’avion, par exemple une perte d'un moteur. Quant aux satellites qui pourraient recevoir ces signaux, il y a plusieurs options possibles. Les opérateurs de satellites font des propositions pour répondre aux exigences de cette future norme.

Depuis les années 80, les avions commerciaux sont équipés de balises de détresse Cospas-Sarsat qui les localisent en cas de crash. Mais dans le cas du vol MH370, cette balise n'a pas fonctionné. Pourquoi ?

Actuellement, ces balises sont activées soit manuellement par l'équipage, soit automatiquement lors du choc. Malheureusement lorsque les crashs ont lieu en mer, l'avion sombrant rapidement, le signal n'a pas le temps d'être transmis aux satellites. C'est ce qui a probablement dû se passer dans le cas du vol MH370, mais aussi lors du vol Rio-Paris en 2009. Ces drames ont conduit l’OACI à travailler à l'amélioration des systèmes de déclenchement des balises Cospas-Sarsat. Une seconde génération est en cours de développement. Elle reprendra les spécifications en cours d’élaboration par un groupe de travail international constitué d’experts du monde aéronautique et de Cospas-Sarsat. Ces balises seront capables de se déclencher automatiquement lorsque les paramètres de vols seront considérés comme anormaux. Elles pourraient aussi être activées par les opérateurs au sol en cas de besoin. Dans le cas du vol MH370, cela aurait permis de localiser l'avion rapidement– il a volé plusieurs heures sans être détecté. Cette fonctionnalité innovante sera possible avec l’arrivée d'un nouveau système utilisant des instruments embarqués sur les satellites européens Galileo. Il nous reste à convaincre tous nos partenaires de l'intérêt de cette activation à distance.

Les satellites Galileo amélioreront aussi la localisation des balises de détresse Cospas-Sarsat. Comment ?

Actuellement, les signaux des balises sont détectés instantanément par l'un des 6 satellites Cospas-Sarsat en orbite géostationnaires mais ils ne permettent pas de localiser précisément la balise – sauf si la balise est également d'un récepteur GPS. Il faut attendre entre 2 et 4 h pour que les satellites en orbite basse altitude la localisent. Grâce à la constellation de satellites Galileo en orbite à moyenne altitude, il sera possible de détecter mais aussi de localiser instantanément les avions et les bateaux en détresse avec une couverture mondiale en quasi-temps réel. Les satellites Galileo ne seront pas les seuls à être équipés de ces nouveaux récepteurs : les futurs satellites GPS III américains et les Glonass russes le seront également. Ce système devrait être opérationnel en 2018-2019.

Le saviez-vous ?

Depuis sa création en 1982, le système de balises Cospas-Sarsat a secouru plus de 37 000 personnes dans le monde. A Toulouse, le CNES héberge l'un des 30 centres de contrôle et de mission qui reçoit les signaux d’alerte et les redistribue aux centres de secours concernés. Opérationnel 7j/7 et 24h/24, il contribue au sauvetage d'une centaine de personnes par an.

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