8 Novembre 2016

Vendée Globe 2016

Le 6 novembre, 29 bateaux monocoques ont quitté les côtes françaises pour un tour du monde, via les mers du sud. Une course mythique en solitaire, sans escale et sans assistance. Les satellites veillent toutefois sur les skippers et leurs bateaux…
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Bateau du Vendée Globe Crédits : © Gilles Martin-Raget/Bastide Otio/Vendée Globe

Les satellites dans la course

Mobilisation générale

Le Vendée Globe est réputé être la course autour du monde à la voile la plus difficile. Seuls sur leur bateau, les navigateurs affrontent les mers les plus dangereuses du globe sur une route qui double des caps mythiques : le cap de Bonne Espérance en Afrique du Sud, le cap Leeuwin au sud de l’Australie, et le cap Horn à l’extrémité de l’Amérique du Sud.

Seuls ? Pas tout à fait. Ils sont en permanence sous l’œil d’une centaine de satellites qui relaient leurs communications mails ou téléphoniques avec leur famille, leur équipe, le PC course, enregistrent leur position ou observent leur environnement pour repérer d’éventuels dangers.  

Des spécialistes à l'affût

Les satellites de télécommunication de la constellation Iridium, nombreux autour de la Terre, relaient les signaux émis par des balises embarquées. Pour détecter les icebergs, on utilise des satellites altimétriques comme Jason 2 et 3, Saral-Atika ou Sentinel 3, mais aussi les satellites radar imageurs comme Radarsat 2, Sentinel 1A et Sentinel 1B. Les satellites Sentinel 1A et B, habituellement braqués sur l’hémisphère Nord, vont exceptionnellement scruter l’Antarctique, à l’affut des icebergs qui pourraient croiser la route des navigateurs. À l’occasion, des satellites optiques peuvent aussi photographier ces morceaux de glaciers qui se détachent du continent arctique.

Balises à bord

Chaque bateau emporte trois types de balises qui permettent de les localiser. Elles émettent des signaux radios, relayés par des satellites. Une balise Iridium signale leur position géographique, toutes les 6 minutes pendant les phases de départ et d’arrivée, puis toutes les 30 minutes durant la course. Une balise Argos à retournement se déclenche en cas de chavirage et une autre balise de détresse, Cospas-Sarsat, s’active aussi en cas de grave problème, soit automatiquement soit sur action du skipper, pour alerter les secours.

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Le centre de contrôle CLS Crédits : © CLS

Communication sous surveillance

A Terre, c’est le centre des opération spatiales CLS (Collecte Localisation Satellites), filiale du CNES, qui, depuis Toulouse, recueille les données des satellites, les analyse puis les renvoie au PC course. Seul ce dernier est habilité à les distribuer ensuite : aux personnes chargées d’établir le classement, à celles chargées de la sécurité, qui alertent les navigateurs en cas de danger de grosse vague, de coup de vent, ou de passage d’iceberg.

La sécurité d'abord

Icebergs en vue

Les icebergs sont de vrais dangers pour les navigateurs. Ils peuvent surgir par surprise et créer des dommages importants aux bateaux qui les percutent. Même ceux de petite taille. Les satellites d’altimétrie comme Jason, détectent les zones où ils risquent d’être présents et les satellites radar les repèrent, même à travers les nuages ou la nuit. On sait aussi prévoir leur trajectoire grâce à un modèle de dérive qui est alimenté par des données de prévisions météorologiques et océanographiques.

Fixer les limites

Dès la première édition du Vendée Globe en 1989, les satellites ont été utilisés pour localiser les bateaux. Depuis 2008, les données des satellites sur les icebergs permettent au PC course de fixer des « portes » par lesquelles les navigateurs doivent passer pour limiter les risques induits par les icebergs ou les grosses vagues.

Pour l’édition 2016, fini les portes. Une ligne de sécurité a été tracée au sud de laquelle les navigateurs ne doivent pas passer. Cette Zone d’Exclusion Antarctique (ZEA) vise en particulier à limiter les risques de rencontre avec des fragments d’iceberg, des glaces dérivantes de petite taille qui se déplacent rapidement.

Secourir

Les navigateurs qui franchissent les limites de sécurité se voient imposer des pénalités. Car la priorité est aujourd’hui de limiter les risques. Au début du Vendée Globe, plusieurs chavirages et la disparition du canadien Gerry Roufs dans le Pacifique Sud, en 1997, ont fait prendre conscience des dangers que  représentent les vagues et les icebergs dans les mers du sud.

En cas d’incident ou de risque majeur, le suivi et les prévisions sont renforcés. Lorsque qu’Isabelle Autissier a tenté de secourir Gerry Roufs en 1997, le suivi de la tempête lui était vital. En 2012, les satellites ont accompagné Jean-Pierre Dick tout au long de son passage du Cap-Horn : ils surveillaient un iceberg à proximité.

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Cospas-Sarsat

Chaque bateau est équipé d’une balise de secours Cospas-Sarsat. Lorsqu’elle est déclenchée, son signal est renvoyé par l’un des satellites de la constellation Cospas-Sarsat vers une station sol, puis vers l’un des 31 centres de contrôle Cospas-Sarsat et vers le poste de secours maritime de la région. Le centre de mission français Cospas-Sarsat (FMCC) basé au Centre Spatial Toulousain du CNES, va suivre jour et nuit les navigateurs du Vendée Globe.

L'aventure sert la science

Des modèles perfectionnés pour la course

A l’occasion de la 6e édition du Vendée Globe, en 2008, CLS a développé des outils d’observation et de suivi des icebergs pour la course. Cette activité s’est perfectionnée ensuite au fil des autres grandes courses au large. Au vu de la taille de l’océan Austral, la zone ne peut pas être observée partout et en continu. Les icebergs ne sont donc pas surveillés 24h/24h par les satellites. En revanche chaque détection d’iceberg est intégrée au système de prévision de leur trajectoire. Une base de données est ainsi constituée tout au long de la course.

Aujourd’hui en fonction des prévisions météorologiques, on arrive à des modèles de dérive et de prévisions océaniques qui permettent de simuler des trajectoires de façon fiable.

Franck Mercier, responsable du service de détection des icebergs et expert en altimétrie chez CLS. 

De la mer à la Terre

« La course bénéficie des avancées des satellites qui se sont extrêmement perfectionnés ces 10 dernières années, explique Michel Sarthou, responsable Argos au CNES. Leurs observations plus précises, plus fréquentes ont contribué à faire avancer nos connaissances des océans. »
Et en parallèle, leur utilisation en course a également amélioré l’exploitation des données satellites. « Notre expérience sur le Vendée Globe a véritablement fait progresser notre compréhension des systèmes océaniques, en particulier grâce à l’exploitation de données multiples, renchérit Sophie Besnard, chef de projet Vendée Globe chez CLS. C’est l’une des rares applications où les 3 technologies —radar, altimétrie et optique – se rejoignent. » Cette expertise permet aussi d’améliorer les prévisions océaniques et… climatiques.

Des balises pour les écoles

Cinq navigateurs du Vendée Globe ont choisi de partager leur aventure  avec des scolaires. Ils participent au programme scientifique et éducatif du CNES Argonautica, support à l’étude de l’environnement océanique et du climat. Ils ont embarqué à leur bord des  balises Iridium MARYI, appelées aussi balises jaunes, qu’ils largueront dans les grands courants sud équatorial et circumpolaire. Les 350 classes inscrites au programme Argonautica pourront ainsi suivre le parcours de ces balises et en récupérer les données et échanger avec les navigateurs.

Deux balises ECHO seront également testées par deux des concurrents. Elles ont été mises au point par des lycéens pour étudier de nouvelles sources d’énergie fournies par le Soleil ou les vagues.

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