14 Octobre 2009

Balises Argos pour animaux branchés

Suivre les animaux, c'est apprendre sur l'évolution de notre environnement

Des animaux suivis à la trace

Arborer une balise Argos, c'est désormais une tendance planétaire ! Plus de 6000 animaux ont adopté cet accessoire à Cayenne (Guyane), Bamako (Mali), Kerguelen (océan austral)....

Balise Argos, l'accessoire à la mode

La balise Argos, voilà un accessoire loin d'être futile : elle permet aux biologistes de suivre en temps quasi-réel le déplacement des animaux.

Combien de kilomètres font-ils par jour ? Quelle direction prennent-ils ? S'arrêtent-ils pendant leurs migrations ?

Tous les animaux, ou presque, peuvent porter une balise Argos.

Mais la mode a pris surtout chez les animaux à plumes qu'il est pratiquement impossible de suivre autrement.

Bien sûr, les animaux terrestres ne sont pas en reste : Argos permet de suivre les tigres sans les poursuivre dans les forêts tropicales, de pister les chameaux dans le sable du Sahara ou les lynx dans la neige nord-canadienne !

Les poissons et les mammifères marins sont aussi concernés.

Des cigognes conseillères en conservation

Les cigognes ont été parmi les premières espèces à porter des balises Argos.

La raison n’est pas leurs longues pattes menues de mannequin, mais au contraire le poids conséquent de ces animaux : 3,5 kg en moyenne.

Les balises des années quatre-vingts n'étant pas encore miniaturisées, il fallait des animaux costauds pour les supporter !

Grâce aux balises, on a découvert les nombreux obstacles tendus sur la route migratoire des cigognes : lignes à moyenne tension sur lesquelles les cigognes s’électrocutaient, châteaux d'eau dans lesquels elles se noyaient, etc. Depuis, des mesures ont pu être prises pour remédier à ces problèmes.

Des virus surveillés du coin de la plume !

En 2006, quand la grippe aviaire a quitté l'Asie pour gagner l'Europe et l'Afrique, les oiseaux sauvages ont été montrés du doigt.

À tort ou à raison ?

Faute de données sur la vitesse de croisière ou le plan de vol des migrateurs, impossible d’avancer une réponse.

On a donc équipé plus de 50 canards en Afrique.

Ce n’était pas suffisant pour répondre à la question posée, mais pour la première fois on a pu visualiser le chemin rectiligne emprunté par ces animaux pour traverser le Sahara et la Méditerranée.

Et pour la première fois, on a identifié les zones humides où ils rencontrent d'autres espèces et peuvent… s'échanger les virus !

Défilés de thons pour une meilleure gestion

Pour suivre les poissons, rien de mieux qu’une balise Argos pop'up.

Elle est programmée pour s'auto-larguer et remonter à la surface après avoir passé sur le dos de l’animal un temps défini par les chercheurs.

Elle envoie alors aux satellites toutes les informations enregistrées pendant son séjour dans l'eau (température, intensité lumineuse, pression...).

Dès lors, on peut : un, calculer les positions journalières de l’animal ; deux, rectifier au mieux la gestion de la pêche.

Par exemple, on s'est rendu compte que les populations de thons rouges de Méditerranée et d'Atlantique Nord se mélangeaient de manière plus importante qu’on ne le pensait.

Cette conclusion remet en cause la politique de pêche concernant cette espèce menacée.

Approfondir :

Lire l'article "Argos et les oiseaux du bout du monde" sur le site du CNES

Voir les vidéos "Les animaux d'Argos" sur le site du CNES

 

Les coulisses d'Argos

Voilà trente ans que les balises Argos ont vu le jour. Si elles ont toujours autant de succès, c'est qu'elles reposent sur une technologie bien rodée !

Des balises "prêt-à-porter"

Il y en a pour tous les goûts : des balises "sac à dos", des balises "chapeaux chics", des balises "ceintures sportives"...

Un accessoire à choisir en fonction de sa morphologie et ses habitudes de vie.

Mais ne porte pas Argos qui veut. Car il y a une condition impitoyable dans l'univers de la mode Argos : le poids de la balise par rapport à celui de l'animal.

La balise, mais aussi sa pile, sa puce électronique, son antenne profilée, ses capteurs ne doivent pas représenter plus de 3 % du poids de l'animal.

Aujourd'hui, les balises de taille S font 12 g, ce qui convient à un oiseau de 400 g.

Mais que les coucous et les grives se rassurent : une balise de 5 g est actuellement en test.

Cliquer pour voir une animation du système Argos
Cliquer pour voir une animation du système Argos

Des messages de 010101110

Toutes les 90 à 200 secondes, les balises Argos émettent un court message dans toutes les directions.

Ce message, sous la forme de 01001100, contient notamment le numéro d'identification de l'émetteur.

S'il est entendu au moins quatre fois par un satellite, la balise pourra être localisée précisément.

Depuis leur orbite, à 850 km d’altitude, six satellites redessinent, message après message, les parcours des émetteurs.

À terre, 55 stations de réception reçoivent l’information retransmise par les satellites, qu’elles transfèrent aux deux centres de traitement, à Toulouse et Washington, où des ingénieurs les décodent, comme par exemple Jean-Pierre Malardé, responsable système Argos, qui nous explique en quoi son travail consiste.

Ainsi, les chercheurs peuvent suivre le déplacement des animaux... depuis leur bureau !

Dans la mythologie grecque, Argos est un géant dont la tête est ceinturée de 100 yeux. Même endormi, il en garde 50 toujours ouverts. Rien ne lui échappe !

Aujourd'hui, le système Argos ne porte pas uniquement ses regards sur le déplacement des animaux, mais aussi sur l'humeur des océans (température, niveau d’eau,...) grâce aux bouées. Ou encore sur l'humidité de l'air, la vitesse et la force des vents grâce aux ballons lâchés dans l'atmosphère. Et même, sur les voiliers de course du Vendée Globe pour fournir le classement et retrouver les skippers en détresse. Argos a ainsi de nombreuses applications. Le système Argos a fêté ses 30 ans en octobre 2009 ! Cela a été l'occasion d'organiser une ouverte jusqu'au 10 janvier 2010.


Argos, 30 ans à baliser la planète

Les 30 ans du système Argos font la une du du mois d'octobre 2009. Une multitude d'applications pour ce système de localisation...y compris pour les classes avec le projet Argonautica que vous propose le CNES.

Des élèves aux premières loges avec ArgoNimaux

Cette année encore, le Service Jeunesse et acteurs de l'Education du CNES propose aux classes le projet éducatif ArgoNimaux. N'hésitez pas à en parler à vos professeurs ! Vous pourrez suivre plusieurs animaux équipés de balises  Argos :

Socoa, Pitchoune, Antioche et Bambi ont regagné le large le 24 septembre 2009. Antioche et Bambi ont été équipées de balises...vous pouvez d'ores et déjà suivre leurs trajets sur notre site dédié aux enseignants !
  • avant la fin de l'année, des manchots royaux de Crozet, des manchots empereurs de de Dumont Durville, des éléphants de mer et albatros de Kerguelen (projet en collaboration avec le Centre d'Etudes Biologiques de Chizé, un laboratoire du CNRS).

En savoir plus :

Des éléphants de mer qui en disent long

Au pôle Sud, les éléphants de mer sont une vraie mine d’informations. Armés de balises Argos, ils envoient des salves d'informations qui font les choux gras des chercheurs en biologie et en océanographie.

Se ravitailler à 2000 km de distance

Imaginez-vous obligé de parcourir 2 000 km pour faire vos courses et 2 000 km pour revenir à la maison… Moyennement motivé, non ?

Ça ne fait pas peur aux éléphants de mer qui, eux, font le trajet une à deux fois par an.

Depuis les îles françaises de Kerguelen, perdues dans les eaux glaciales de l'océan austral, les animaux mettent le cap début mars sur leur frigo géant : l'Antarctique.

Le voyage dure un mois, avec en moyenne 60 plongées par jour, à 500 m de profondeur.

Sous cette épaisseur d’eau, ils ont plus de chance de croiser des bancs de poissons et de calmars pour se nourrir.

Arrivés à la frontière de la banquise, les éléphants de mer restent plusieurs mois à refaire leur stock de graisse.

Un moyen mémotechnique pour situer l'Antarctique  par rapport à l'Arctique ? Le mot Antarctique est plus long, "plus lourd" que le mot Arctique : il "tombe" donc...l'Antarctique est au sud !

Suivre les animaux, les doigts de pied en éventail

Si l’on connaît désormais le parcours des éléphants de mer, c’est grâce à… Argos bien sûr.

Et pour des biologistes comme Christophe Guinet, spécialiste du mastodonte, quel bonheur de suivre les plongées de ses protégés tout en restant confortablement assis dans son bureau du Poitou… Merci la technologie !

Sur son ordinateur, le déplacement d'une vingtaine d'individus apparaît en temps quasi-instantané.

Auparavant, il aura tout de même fallu que Christophe aille sur les terres gelées de Kerguelen pour équiper chaque animal d'une balise.

Si la technique est maintenant bien rodée pour les femelles de 400 kg, elle l’est moins pour les mâles de plus de deux tonnes !

Equiper un éléphant de mer, toute une technique !


Radio éléphant de mer

Si les biologistes essaient de mieux comprendre les animaux, les océanographes cherchent à connaître les secrets de l’océan : température, salinité et tout ce qui peut en découler.

À partir de ces données, ils établissent des modèles des courants marins et prévoient leur évolution.

En deux ans, les éléphants de mer ont fourni aux océanographes cent fois plus de profils de températures sur l'océan austral que ne l’avaient fait les méthodes classiques. Pas facile, en effet, pour un bateau océanographique d'aller naviguer près de la banquise antarctique, un milieu hostile pour l’homme et ses instruments.

Les mammifères marins au contraire s’y trouvent comme des "poissons" dans l’eau.


Grâce aux éléphants de mer, les océanographes ont obtenu les premières données sur les conditions nécessaires à la formation de la banquise - © CNES/Le Journal de l'espace (mars 2009)

Des bêtes bien au courant

Quelle sera la température de la Manche la semaine prochaine ?

Quelle route maritime prendre pour économiser le plus de carburant ? Vous n'avez qu'à poser ces questions aux éléphants de mer ! Enfin presque...

D’ici 2012, des modèles numériques en 3D répondront gratuitement à ce genre de questions, en s’appuyant sur les données satellitaires provenant des animaux.

Mais pas seulement : ils se baseront aussi sur la température et la hauteur de la surface des océans, mesurées directement par des satellites tels que Jason (satellite franco-américain) ou Envisat (satellite européen), ou par des bouées dérivantes, sondes plongeantes...

Le tout pour répondre à la question : "Quel océan fera-t-il demain ? " .

En savoir plus :

  • L'éléphant de mer sur le site du CEBC/CNRS, laboratoire auquel appartient Christophe Guinet