15 Juin 2011

Les rumeurs de l'espace

Les rumeurs… Elles font feu de tout bois, et le domaine du spatial ne déroge pas à la règle.

Elle court, elle court… la fausse nouvelle

Canulars, mystifications et rumeurs n'épargnent pas le domaine du spatial, et certains reviennent avec la régularité d'un coucou suisse. En voici parmi les plus fréquents.

Mars serait aussi grosse que la [no-lexicon]Lune[/no-lexicon]

Ce sera un spectacle à couper le souffle ! Ce soir, Mars sera plus près de la Terre qu'elle ne l'a jamais été : dans le ciel, elle sera aussi grosse que la pleine lune ! Un événement exceptionnel à ne pas rater... Mais que vous ne verrez jamais.

Pour que Mars soit aussi grosse que la Lune à l’œil nu, il faudrait que la planète soit bigrement proche de nous : moins de 800 000 kilomètres. Or la distance séparant la Terre de Mars varie entre 56 et 400 millions de kilomètres.

On pense que cette mystification est née le 27 août 2003, un jour où la distance entre la Terre et Mars était à son minimum, soit 56 millions de kilomètres. Mars est alors apparue comme un point plus brillant qu'à l'ordinaire. Et comme le phénomène se reproduit tous les deux ans, la rumeur revient avec la régularité d'un coucou suisse.

En 2012 sonnera la fin du monde…

La fin du monde est toujours pour demain. La prochaine échéance est prévue pour le 21 décembre 2012, avec au menu, selon les versions, météores tueurs, volcans exterminateurs ou alignement de planètes mortel.

Cette fois, c'est le calendrier des anciens mayas qui le dit. Enfin, c’est ce qu'on lui fait dire depuis les premières fouilles des sites mayas au début du XXe siècle... En effet, ce calendrier n'évoque nullement une fin du monde, mais une simple fin de cycle.

D'ailleurs, il n'y avait pas un mais plusieurs calendriers mayas, dont les cycles, déterminés par la position des astres dans le ciel, étaient plus ou moins longs. Ainsi, le calendrier rituel Tzolk’in se déroulait sur 260 jours, et le Haab sur 365. Des cycles qui s'achevaient régulièrement sans que le monde ne cesse pour autant de tourner.

Petit futé, le réalisateur Roland Emmerich s'est emparé de cette croyance apocalyptique pour la transformer en superproduction intitulée 2012.

 

Nibiru la menaçante

Nibiru : une planète inconnue du grand public mais parfaitement identifiée par les autorités… Et pour cause, elle représente une menace qu’il faut taire pour ne pas affoler la population.

L'existence de ce corps céleste a été supposée par de nombreux astronomes dès 1846. En étudiant les différences entre les orbites théoriques et les orbites réelles constatées aussi bien sur Saturne, Uranus que Jupiter, ces savants découvrent une nouvelle planète : Neptune.

Enthousiastes, ils pistent d'autres éventuelles incohérences entre orbites et remarquent de petites anomalies dans la trajectoire de Neptune. Il n'en fallait pas plus pour que le monde scientifique se mette à traquer une planète inconnue susceptible de causer ces perturbations.

On sait aujourd'hui que ces « anomalies » n'étaient dues qu'à… des erreurs de calcul.

 

Le terrible projet HAARP

Le projet High Frequency Active Auroral Research Program, abrégé en HAARP, est un programme de recherche militaire et scientifique américain. Parmi les objectifs affichés : étudier les propriétés de l'ionosphère, la couche supérieure de l'atmosphère comprise entre 120 et 800 km d’altitude.

L’intention étant de comprendre comment des orages magnétiques affectent les communications radio ou les systèmes de navigation GPS. Pour cela, les scientifiques envoient des ondes radioélectriques depuis un réseau d'antennes au sol afin de mesurer la manière dont l'ionosphère réagit.

Mais dans un livre publié en 1995, deux auteurs affirment que ce programme sert en fait à provoquer des catastrophes climatiques ou, mieux encore, à contrôler les esprits à distance. Ah... s'il suffisait de lancer un programme de recherche pour acquérir des supers-pouvoirs...

Grosses ficelles et malentendus

Qu'il s'agisse de coups montés de toute pièce, de farces, ou de mauvaises interprétations, les rumeurs courraient déjà au temps de nos arrière-grands-parents.

Le canular des Sélénites

En 1835, Sir John Herschel, un célèbre astronome britannique, effectue un long séjour en Afrique du Sud pour y observer le ciel. Loin des journaux et des postes de radio, il ne se doute pas qu'un journaliste américain du New York Sun va se servir de son nom et de sa notoriété pour monter un savoureux canular.

En août, le journal publie un article selon lequel Herschel, grâce à son télescope révolutionnaire, a découvert que la Lune était habitée. Y sont décrits de vastes forêts lunaires, des lacs, des bisons, mais aussi des licornes, des castors bipèdes et des êtres humanoïdes ailés !

L'article et ceux qui suivirent eurent un succès retentissant. Même après que la supercherie fut révélée, le journal n’a jamais publiquement admis s'être fait rouler dans la farine.

La farce d'Orgueil

En mai 1864, une météorite s'écrase dans un champ de la commune d'Orgueil, au sud de la France.

Près d'un siècle plus tard, le géochimiste américain Bart Nagy examine un des fragments de cette météorite et y trouve... ce qui ressemble à des traces de petits fossiles.

Ces résultats, qui laissent supposer l'existence d'une vie extraterrestre, ont fait l'effet d'une bombe.

Une autre équipe de chercheurs américains réexamine l'échantillon. Bien plus que des fossiles, elle y trouve carrément des fragments de graines !

Aussitôt mobilisée, la communauté scientifique finit par découvrir que ces éléments végétaux proviennent en fait du sud de la France.

Ils ont été collés par un mystificateur au siècle précédent, afin de soutenir une thèse selon laquelle la vie peut apparaître spontanément.

La performance d’Orson Welles

Réalisateur, acteur, romancier, producteur et scénariste américain, Orson Welles est aussi un farceur... malgré lui.

Le 30 octobre 1938, il fait une lecture radiophonique inspirée du roman de science fiction La guerre des mondes de H.G. Wells. Il raconte l'invasion de la terre par les martiens comme un reporter vivant en direct les événements. À l’antenne, Orson Welles prévient qu'il s'agit d'une pièce radiophonique mais le ton est si juste qu'un vent de panique s'empare des auditeurs.

Pendant plusieurs heures, le standard de la radio et celui des commissariats de police croulent sous les appels affolés.

Grâce à ce canular involontaire, dont tous les médias parleront pendant une semaine, Orson Welles devient célèbre du jour au lendemain.

Regard biaisé sur Mars

Parmi les images recueillies par la sonde Viking 1, envoyée pour scruter le sol de Mars, un cliché attire l'attention. On peut y voir ce qui ressemble à un visage humain. Un simple jeu d'ombres explique la NASA.

Néanmoins, le cliché intrigue deux ingénieurs qui se mettent à traquer d'autres structures bâties par les petits hommes verts. Et ils pensent les avoir trouvées. En 1981, ils publient leurs travaux dans un livre rapidement popularisé par un magazine américain.

La rumeur est lancée. Il faudra attendre 1998 pour que les images de la sonde Mars Global Surveyor, d’une meilleure résolution, prouvent que le visage n'est en fait qu'une colline érodée. Interprétation a nouveau confirmé en 2002 et 2006 par les sondes Mars Odyssey et Mars Express.

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Hoax et esprit critique

Regroupées sous le terme de « Hoax » en anglais, les rumeurs abusent de la crédulité des gens. Voici quelques pistes pour les détecter.

Malicieuse mystification

Depuis que le phénomène du « buzz » est devenu la nouvelle manière de faire de la publicité, la rumeur devient une redoutable arme de marketing.

Exemple avec Riccione, une ville au nord de l'Italie, où la mairie a eu une idée simple à l'été 2001 : tracer au sol des marques circulaires suggérant l'atterrissage d'un vaisseau alien, puis laisser faire le bouche à oreille…

La presse n'a pas tardé à rappliquer avec caméras et micros, afin de parler abondamment (et gratuitement !) de la ville.

Cette dernière a révélé la supercherie quelques jours après. Le plan pub avait parfaitement fonctionné ! Mais de tels canulars peuvent aussi avoir pour motivation de dénoncer par l'absurde, ou simplement d'amuser.

Identifier l'auteur d'une telle annonce est souvent une bonne manière de la désamorcer.

Elles se suivent et se ressemblent

Qu'elles portent sur le terrorisme, la politique ou les extraterrestres, les rumeurs et les mystifications utilisent souvent les mêmes grosses ficelles : exploiter l'émotion.

Soit une crainte : fin du monde, complots gouvernementaux, organismes secrets qui nous veulent du mal, nous cachent des choses, nous mentent ou nous espionnent ; soit un espoir : vivre quelque chose d'unique, découvrir une civilisation extraterrestre bienveillante...

Sur ce terreau fertile, toutes les rumeurs peuvent fleurir à partir du moindre déclencheur.

Ainsi, le calendrier des anciens Mayas qui s'arrête en 2012 devient une annonce de fin du monde. Une vague forme de visage sur une photo de sol martien devient une construction extraterrestre, et un programme de recherche militaire devient une arme capable de contrôler l'esprit à distance...

Roswell : quand les médias s'en mêlent

Lorsqu'elles circulent sur Internet, la plupart des rumeurs sont relativement simples à identifier. Des sites tels que hoaxbuster.com en recensent et en décortiquent en grand nombre.

Toutefois, lorsque les médias les montent en épingle, il devient plus difficile de démêler le vrai du faux.

Ce fut le cas d’une vidéo montrant l'autopsie d'un corps humanoïde, le soi-disant cadavre d'un extraterrestre retrouvé dans l'épave d'un engin qui se serait écrasé dans la ville de Roswell, à la fin des années quarante. Prétendument tournée en 1947, la vidéo ne sera « révélée » au public qu’en 1995.

Aussitôt, les médias s'enflamment et les droits de diffusion du film sont rachetés à prix d'or par les chaînes de télévision de plus de 25 pays.

Ainsi, diffusé en France par TF1 le 26 juin 1995, il laisse entendre que l'autopsie est probablement authentique. Les producteurs du film avoueront en 2006 que tout était du chiqué.

Les hoax de demain

Les rumeurs sont souvent saisonnières et/ou liées à l'actualité scientifique.

Par exemple, avec les beaux jours, plus propices à passer des débuts de soirée les yeux dans les étoiles, Mars devient aussi grosse que la Lune. Et lorsqu'une actualité scientifique médiatique survient, elle est souvent accompagnée d’un cortège de rumeurs.

Ce fut le cas pour le grand accélérateur de particules (le LHC près de Genève), inauguré en septembre 2008 : la rumeur prétendait qu'il pourrait créer un trou noir mortel… Aujourd’hui, il fonctionne et la planète n'a toujours pas été avalée. 

Avec les récentes découvertes d’exoplanètes (on en a recensé plus de 500 en 2010), il y a fort à parier que les prochains hoax feront état de signaux émis par une vie intelligente, mais que, naturellement, les agences spatiales feront tout pour étouffer l'information...

 

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